Le tout « premier Heidegger », en français
Les premiers cours du philosophe allemand, datants de 1919, paraissent au Seuil.
Partager (8)Tweeter
Vers une définition de la philosophie (Zur Bestimmung der Philosophie), de Martin Heidegger, traduit de l'allemand par Sophie-Jan Arrien et Sylvain Camilleri, Seuil, « L'Ordre philosophique », 290 p., 25 €.
Malgré sa technicité, Vers une définition de la philosophie, recueil de cours – les premiers – prononcés en 1919 par Martin Heidegger (1889-1976) à l'université de Fribourg-en-Brisgau, alors que l'Allemagne se relève difficilement de la défaite, constitue une sorte d'événement.
Hormis de rares escapades chez d'autres éditeurs, la publication en français de l'auteur d'Etre et Temps est longtemps demeurée l'apanage de Gallimard et des proches de la famille du philosophe, aujourd'hui représentés par François Fédier, dont certaines traductions sont contestées. Jean-Claude Monod et Michaël Fœssel, qui dirigent « L'ordre philosophique » au Seuil, entendaient bien briser cette priorité et prendre sous leur houlette les « Cahiers noirs », ces milliers de pages que leur auteur vouait à une publication post mortem, comportant notamment des révélations gênantes sur l'engagement nazi du philosophe. Peine perdue. Les « Cahiers noirs » resteront chez Gallimard et la traduction en sera assurée par François Fédier.
Par trop sulfureux
Le Seuil a dû se rabattre sur d'autres textes, à commencer par les écrits du « premier Heidegger » des années 1920. L'initiative a été assortie d'une autojustification en forme de « propos éditorial », comme si l'auteur était décidément devenu par trop sulfureux. « Il s'agit (…) d'offrir au lecteur français les moyens de formuler lui-même la "question Heidegger" », écrivent les éditeurs. Dans le choix des traducteurs, ils éviteront l'« orthodoxie » heideggerienne autant que les disciples d'Emmanuel Faye, qui veulent « reléguer cette œuvre au rang de document historique sur les errements des intellectuels ralliés au IIIe Reich ».
Le choix de ce volume, excellent préalable à qui souhaite lire Etre et Temps, illustre donc une nouvelle manière de prendre la philosophie de Heidegger à la fois au sérieux et sans complaisance. On y voit cet extraordinaire enseignant et historien de sa discipline chercher une alternative à la philosophie néokantienne de son temps, afin d'inventer un autre modèle de penser que celui de la connaissance ou de la science. Un Heidegger habité par les questions philosophiques et « pas encore trop gâché par les engagements ultérieurs », s'empresse de préciser Jean-Claude Monod.
Signalons, de Martin Heidegger, avec Eugen Fink, la parution en poche d'Héraclite. Séminaire du semestre d'hiver (1966-1967) (Heraklit), traduit de l'allemand par Jean Launay et Patrick Lévy, Gallimard, « Tel », 272 p., 12,50 €.
Evernote helps you remember everything and get organized effortlessly. Download Evernote. |
No comments:
Post a Comment